Canicule et pénurie d’eau, le vignoble français en situation d’urgence

Sans une seule goutte de pluie à l’horizon depuis le début cet été, le vignoble français souffre d’un cruel manque d’eau. Un phénomène bien connu en France, et de plus en plus récurrent, au grand dam des vignerons impuissants devant leur vigne en état de « stress hydrique ». Le monde viticole, démuni devant cette situation de crise nationale, ne peut que constater l’ampleur des dégâts qui s’annoncent, notamment une importante perte de volume ainsi qu’une récolte beaucoup plus tardive. Si le sud-est du territoire français a été le premier impacté par le phénomène, l’ensemble du vignoble est aujourd’hui concerné. Dans cette lutte contre le stress hydrique, le groupe ICV (Institut Coopératif du vin) émet plusieurs recommandations sur la conduite à tenir en cas de canicule dans le but de limiter les dégâts. Les biostimulants semblent également apporter une piste sérieuse pour parer les effets de la contrainte hydrique : selon les résultats d’une étude récente, ces produits innovants pourraient devenir la solution miracle de demain contre les périodes de fortes chaleurs.

Un épisode de sécheresse inédit : entre 60 et 80 % de pertes estimées

Feuilles jaunes et flétries, les signes précurseurs de stress hydrique alertent les vignerons depuis le mois de juillet. En cause, le manque de pluie qui dure depuis le début de l’été, et qui ne manque pas de rappeler amèrement les années 2016 et 2017 aux vignerons de France.
Dès la fin du mois de juin, le président de la Chambre d’agriculture de l’Hérault, Jérôme Despey, tenait un discours plus qu’alarmiste sur la cuvée 2019, en annonçant « des dégâts de 60 à 80 % de perte ». Les vignobles du sud de la France ont été les premiers à subir cet épisode caniculaire particulièrement précoce cette année, et une cellule d’urgence a été mise en place dès le 1er juillet.
Cette année, l’épisode de sécheresse a démarré avant la véraison : en manque d’eau, la vigne se plonge dans un état végétatif bloquant complètement la croissance des grains et leur mûrissement, et la surface foliaire brûlée ne protège plus les grains, qui se dessèchent sous les ardeurs du soleil brûlant.

Le stress hydrique : des solutions en amont pour limiter les dégâts de la canicule

Pour parer au stress hydrique, l’ICV n’hésite pas à rappeler les bonnes conduites à adopter en amont pour limiter l’impact de la sécheresse telles que l’entretien des rangs ou la réalisation d’un couvert végétal pour conserver l’humidité de la terre.
Olivier Jacquet rappelle également : « Il vaut mieux travailler la vigne avant que pendant, et la laisser tranquille pendant la canicule, pour ne pas perturber son équilibre ». L’effeuillage est d’ailleurs fortement déconseillé : « Il faut laisser une certaine épaisseur de feuillage pour garder le raisin à l’ombre aux heures les plus chaudes ».
Ces épisodes caniculaires ne manquent pas de raviver le débat sur l’accès à l’eau dans les AOP : en France, force est de constater que les parcelles irriguées sont nettement moins impactées par ces épisodes de sécheresse intense. « Ce qui est clair, c’est que l’eau est primordiale pour assurer la pérennité de la viticulture. Cet épisode le prouve à ceux qui doutent que l’eau n’est pas une vitalité », selon Jérôme Desprey.

Irrigation ou biostimulants : l’avenir de la vigne en plein débat

Selon les travaux menés par la Chambre de l’agriculture du Var, les biostimulants pourraient être une solution alternative à l’irrigation : suite à l’application d’un activateur biologique, puis d’un stimulant foliaire sur une parcelle test, les résultats scientifiques attestent d’une efficacité dans la lutte contre la contrainte hydrique. Au terme de ces travaux bioscientifiques, la conseillère en viticulture Clémence Boutfol affirme que « la modalité traitée était systématiquement moins stressée, avec des résultats d’autant plus intéressants que l’année est sèche », ainsi qu’une « tendance à l’augmentation du rendement dans la modalité traitée ». Une piste intéressante à développer, notamment pour les zones où l’irrigation des vignes ne ferait qu’étendre la problématique de l’eau à toute la filière agricole.